Lettre d'information D-C n° 167 - Mars-Avril 2023
Direction technique Droit économique

Pratiques restrictives de concurrence : condamnation de plusieurs enseignes pour tentative de soumission à un déséquilibre significatif

Cour d’appel de Paris, 15 mars 2023, RG n° 21/13227 et n° 21/13481
 
A la suite de contrôles réalisés par la DGCCRF au sein d’enseignes de la grande distribution dans le secteur « parfumerie-hygiène », le ministre de l’Economie avait assigné ces dernières devant le tribunal de commerce de Paris estimant que certaines de leurs pratiques révélaient une tentative de soumission de l’autre partie à un déséquilibre significatif (anc. art L 442-6, I, 2° C. com. remplacé par L. 442-1, I, 2° C. com.).

S’agissant de la tentative de soumission, la cour d’appel de Paris considère d’abord que « l’idée même d’une négociation présuppose d’emblée la prise en compte des besoins de l’interlocuteur » et « la détermination, même provisoire et sommaire, de contreparties identifiables et quantifiables dès l’entrée en pourparlers » et que leur absence est « un indice pertinent de la soumission ou de sa tentative ». Ensuite, après avoir analysé « la structure du marché et le rapport de force entre fournisseurs et distributeurs », elle relève une situation « déséquilibrée à la faveur [des distributeurs], mais dans une mesure moindre que celle alléguée par le ministre chargé de l’économie ». En l’occurrence elle relève en outre – au terme d’une appréciation des « conditions de la négociation alléguée (…) in concreto »  – une tentative de soumission à l’égard de plusieurs fournisseurs aux motifs notamment de « l’inexistence de toute raison autre qu’un désir d’obtenir un avantage financier sans contrepartie mesurable et commensurable fondant l’entrée en négociation prétendue ainsi que des mesures de rétorsion mises en œuvre ou annoncées ».

S’agissant de l’appréciation du déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, la cour d’appel de Paris le considère caractérisé au motif de « l’absence totale de réciprocité réelle dans les obligations » qui n’était justifiée ni par « la nature du contrat ou de l’activité en cause », « peu important le rapport entre le montant sollicité dans le volume d’affaires global réalisé avec chacun des fournisseurs », un tel procédé induisant « la possibilité pour [les distributeurs] de modifier les accords négociés annuellement unilatéralement, à leur gré et sans autre raison que la recherche d’un avantage financier sans justification objective et sans égard pour l’idée de coopération commerciale » c’est-à-dire en usant d’une faculté « discrétionnaire »  « précaris[ant] l’ensemble de la relation commerciale ».

La cour d’appel de Paris condamne les enseignes au paiement d’amendes civiles s’élevant, au total, à plus de 4 millions d’euros.  
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