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Fidal
Octobre 2024
À la une

Vie privée, vie personnelle et preuve : des précisions jurisprudentielles

Dans trois arrêts du 25 septembre 2024, la Cour de cassation apporte des précisions essentielles relatives à la preuve, au respect de la vie personnelle et de la vie privée.
 
Dans la première affaire, un salarié de la RATP avait été licencié par son employeur pour des faits de détention et de consommation de produits stupéfiants à bord de son véhicule, constatés par un service de police sur la voie publique (hors temps de travail).

La Cour de cassation décide que le motif de la sanction était tiré de la vie personnelle du salarié, sans toutefois relever de l'intimité de sa vie privée, de sorte que, si le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, il n'était pas atteint de nullité en l'absence de la violation d'une liberté fondamentale (Cass. soc. 25 sept. 2024, n°22-20672).
 
Dans la deuxième affaire, elle retient que l'accès par l'employeur, hors la présence du salarié, aux fichiers contenus dans des clés USB personnelles, qui ne sont pas connectées à l'ordinateur professionnel, constitue une atteinte à la vie privée du salarié, de sorte que les preuves tirées de leur exploitation présentent un caractère illicite.

Pour autant, la preuve illicite n’est pas nécessairement irrecevable. Le droit à la preuve peut justifier la production d'éléments portant atteinte à d'autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi. Tel était le cas en l’espèce. La production du listing de fichiers tiré de l’exploitation des clés USB était indispensable à l’exercice du droit à la preuve de l’employeur et l'atteinte à la vie privée de la salariée était strictement proportionnée au but poursuivi (Cass. soc. 25 sept. 2024, n°23-13992).
 
Enfin, la troisième affaire concernait un salarié qui avait été licencié pour faute grave, notamment en raison de propos échangés lors d'une conversation privée (propos sexistes notamment) avec trois personnes au moyen de la messagerie professionnelle installée sur son ordinateur professionnel, dans un cadre strictement privé sans rapport avec l'activité professionnelle. La Cour de cassation décide que cette conversation de nature privée n'étant pas destinée à être rendue publique et ne constituant pas un manquement du salarié aux obligations découlant du contrat de travail, le licenciement, prononcé pour motif disciplinaire était nul comme portant atteinte au droit au respect de l'intimité de la vie privée du salarié (Cass. soc. 25 sept. 2024, n°23-11860).
 
Ces arrêts suscitent incontestablement diverses interrogations et appellent certaines observations.



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Preuve d’une discrimination : communication de bulletins de salaires et respect du RGPD

Afin de faire reconnaître l’existence d’une discrimination syndicale, un conseil de prud’hommes peut-il ordonner à l’employeur de produire les historiques de carrière de plusieurs salariés nommément désignés, ainsi que leurs bulletins de salaire de décembre de chaque année sur les dix dernières années d'exercice ? Une telle communication est-elle conforme aux dispositions du RGPD ?
 
La deuxième chambre civile répond à cette interrogation dans un arrêt en date du 3 octobre 2024 (n°21-20979).  Elle décide qu’un tel traitement résultant de la communication par l'employeur, ordonnée par le juge, de documents comportant des données personnelles répond aux exigences de licéité au sens des articles 6 et 23 du RGPD.
 
Puis, elle se prononce sur l’office du juge et indique qu’il lui appartient :
  • de rechercher si la communication des données est indispensable à l’exercice du droit à la preuve et proportionnée au but poursuivi,
  • de cantonner, au besoin d'office, le périmètre de la production de pièces sollicitées,
  • de veiller au principe de minimisation des données à caractère personnel, en ordonnant, au besoin d'office, l'occultation, sur les documents à communiquer de toutes les données à caractère personnel des salariés de comparaison non indispensables à l'exercice du droit à la preuve et proportionnées au but poursuivi,
  • et de faire injonction aux parties, de n'utiliser les données personnelles des salariés de comparaison, contenues dans les documents dont la communication est ordonnée, qu'aux seules fins de l'action en discrimination.
En l’espèce, la cour d’appel n’avait pas veillé au principe de minimisation des données  et n’avait pas fait injonction aux parties de n’utiliser les données qu’aux seules fins de l’action en discrimination. L’arrêt de la Cour d’appel est cassé.
 
Lire l’arrêt (Cass. 2ème civ. 3 oct. 2024, n°21-20979).
 


Clause de non-concurrence et prescription : des précisions jurisprudentielles

Dans un arrêt du 2 octobre 2024 (n°23-12844), la Cour de cassation apporte des précisions relatives aux délais de prescription applicables à la clause de non-concurrence ainsi qu’à leur point de départ.

Il en résulte que :

  • L’action en réparation du dommage causé par la stipulation d'une clause de non-concurrence illicite est soumise à la prescription biennale. La prescription court à compter de la mise en œuvre de la clause. 
  • Le délai de prescription de l’action en paiement de la contrepartie financière se prescrit par trois ans à compter de la date à laquelle cette créance est devenue exigible.
  • La demande de dommages-intérêts pour non-application de la clause de non-concurrence et atteinte à la liberté du travail se prescrit par deux ans à compter de la date à laquelle le salarié n’est plus tenu de respecter la clause.



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Négociation sur la GEPP : une obligation soumise à l’existence d’un délégué syndical d’entreprise

D’après l’article L. 2242-2 du code du travail, dans les entreprises et les groupes d'entreprises d'au moins 300 salariés, ainsi que dans les entreprises et groupes d'entreprises de dimension communautaire comportant au moins un établissement ou une entreprise d'au moins cent cinquante salariés en France, l'employeur engage au moins une fois tous les 4 ans, une négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP). A défaut d’accord collectif, l’employeur engage cette négociation tous les trois ans (C. trav., art. L. 2242-20).
 
Mais une telle négociation s’impose-t-elle en l’absence de désignation d’un délégué syndical au niveau de l’entreprise ?
 
La Cour de cassation répond par la négative dans un arrêt en date du 11 septembre 2024 (n°23-14333). Elle subordonne l’obligation de négociation dans le cadre de la GEPP à l’existence d’une ou plusieurs organisations syndicales représentatives au niveau de l’entreprise. Il en résulte qu’en l’absence de délégué syndical central, l’employeur n’était tenu à aucune obligation de négociation en matière de GEPP. Cette solution est justifiée.



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Brèves
Modulation : la récupération du trop-perçu par le salarié n’est pas toujours envisageable

Lorsqu'un salarié, soumis à un dispositif conventionnel de modulation du temps de travail avec lissage de la rémunération, bénéficie d'un trop-perçu, une régularisation est-elle possible ?
 
Selon un arrêt rendu le 2 octobre 2024 par la Cour de cassation (n°22-21422), une régularisation peut être opérée par l'employeur sauf si le déficit d'heures travaillées relève d'une insuffisance de planification de la part de celui-ci. C’est notamment ce que prévoyait l’accord d’aménagement du temps de travail applicable en l’espèce.
 
Ainsi, dès lors que l’employeur s’est abstenu de produire le moindre élément relatif à une planification de nature à prévoir des périodes hautes d’activité différentes de celles prévues en principe par accord collectif, il ne peut opérer de régularisation.
 

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Partage de la valeur : Des questions-réponses sur les cas de déblocage du PEE et les avances sur participation et intéressement

Deux questions réponses ont été publiés le 9 octobre 2024.

L’un apporte des précisions sur les 3 nouveaux cas de déblocage anticipé des avoirs détenus par les bénéficiaires d’un plan d’épargne d’entreprise (affectation de sommes épargnées aux travaux de rénovation énergétique, achat d’un véhicule propre et activité de proche aidant).

L’autre porte sur la mise en place d’avances sur les sommes dues au titre de l'intéressement ou de la réserve spéciale de participation
 

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Consultation du CSE et demande d’un complément d’information

Le CSE peut, s'il estime ne pas disposer d'éléments suffisants, saisir le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, pour qu'il ordonne la communication par l'employeur des éléments manquants (C. trav., art. L. 2312-15). Le juge doit être saisi dans le délai imparti au CSE pour émettre son avis.

Dans un arrêt du 9 octobre 2024 (n°23-11339), la Cour de cassation précise que la date de saisine du juge s’entend de celle de l’assignation.
 

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