Lettre d'information D-C n° 169 - Juin/Juillet 2023
Direction technique Droit économique

Accords verticaux : une pratique de prix de revente imposés n’est pas nécessairement une restriction de concurrence par objet

CJUE, 29 juin 2023, aff. C-211/22
 
Un fournisseur portugais avait, pendant une certaine période, « fixé et imposé de manière régulière, généralisée et sans aucun changement » à l’ensemble de ses distributeurs « les conditions commerciales » que ceux-ci devaient respecter lors de la revente de ses produits et notamment des prix minimaux de revente. Après avoir été sanctionné par l’autorité de concurrence portugaise, il avait introduit un recours devant les juridictions portugaises, lesquelles avaient décidé de surseoir à statuer pour interroger la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).

Parmi les questions posées à la CJUE, l’une d’entre elles doit être particulièrement relevée. Elle porte sur le point de savoir si : «  l’article 101, paragraphe 1, TFUE doit être interprété en ce sens que la constatation qu’un accord vertical de fixation de prix minimaux de revente constitue une « restriction de concurrence par objet » peut être effectuée sans examiner préalablement si cet accord révèle un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence ou s’il peut être présumé qu’un tel accord présente, en lui-même, un tel degré de nocivité ».  

La CJUE rappelle tout d’abord que « la notion de « restriction de concurrence par objet » doit être interprétée de manière restrictive » ce dont il découle qu’elle « ne peut être appliquée qu’à certains types de coordination (…) révélant un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence pour qu’il puisse être considéré que l’examen de leurs effets n’est pas nécessaire ». Elle ajoute que « le critère juridique essentiel » pour déterminer si un accord comporte une restriction de concurrence par objet réside dans la constatation qu’un tel accord « présente, en lui-même, un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence » en considération de « la teneur de ses dispositions », des « objectifs qu’il vise à atteindre » ainsi que du « contexte économique et juridique dans lequel il s’insère » ou encore, notamment, de « la nature des biens ou des services affectés » ainsi que des « conditions réelles du fonctionnement et de la structure du marché ou des marchés en question ».

La Cour ajoute que la circonstance tenant au fait que la pratique en cause relève de la catégorie des « « restrictions caractérisées », au sens de l’article 4, sous a), des règlements nos 2790/1999 et 330/2010 » ne suffit pas à dispenser les juridictions de procéder à une appréciation de la nocivité de l’accord en question et de celle de la restriction de concurrence qui y est stipulée, dès lors que « lesdites dispositions (…) ne contiennent pas d’indication sur la qualification desdites restrictions en tant que restriction « par objet » ou « par effet » » et que « les notions de « restriction caractérisée » et de « restriction par objet » ne sont pas conceptuellement interchangeables et ne coïncident pas nécessairement ».

La CJUE répond donc à la question qui lui était posée que « l’article 101, paragraphe 1, TFUE doit être interprété en ce sens que la constatation qu’un accord vertical de fixation de prix minimaux de revente comporte une « restriction de concurrence par objet » ne peut être effectuée qu’après avoir déterminé que cet accord révèle un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence, compte tenu de la teneur de ses dispositions, des objectifs qu’il vise à atteindre ainsi que de l’ensemble des éléments caractérisant le contexte économique et juridique dans lequel il s’insère ».
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