Lettre d'information : Propriété Intellectuelle / Numérique, Tech et Données n° 156 (novembre-décembre 2022)
Direction Technique Droit Economique

Chips en 3D déposées en tant que marques : le fabricant chipsier tiendrait-il sa revanche ?

TUE., 14 décembre 2022, aff. n° T-553/21, Agrarfrost GmbH & Co. KG c/ McCain GmbH

Peut-on déposer l’apparence d’une chips à titre de marque pour désigner des produits en classe 29 « Croquettes de pommes de terre précuites et produit[e]s à base de purée de pomme[s] de terre surgelé[e]s » ?

Cette question rejoint la problématique plus générale de l’enregistrement de marques tridimensionnelles composées du produit proposé par le déposant. Pour y répondre, l’office de dépôt doit décider au cas par cas si le signe envisagé est suffisamment distinctif par rapport aux produits et/ou services désignés dans la demande.

Dans un arrêt du 11 février 2022, la cour d’appel de Paris a répondu à cette question par la négative. Elle a notamment considéré que le consommateur exposé à l’apparence de ce produit n’y associerait pas une marque (c’est-à-dire le marqueur d’un origine commerciale) : « Il suit de ces observations que le consommateur moyen, normalement attentif et raisonnablement avisé des Produits de pomme de terre : Produits à base de pommes de terre; Pommes de terre transformées visés dans la demande d'enregistrement, habitué à rencontrer des 'smileys' sur de nombreux produits alimentaires de consommation courante, d'origines commerciales différentes, ne sera pas enclin à appréhender le signe de la demande d'enregistrement comme un indicateur de l'origine commerciale du produit mais le considérera comme un élément décoratif destiné à présenter favorablement ce produit et à en assurer la promotion ».

Or, dans une décision rendue le 14 décembre 2022, le Tribunal de l’Union européenne a été appelé à statuer sur une marque européenne semblable, déposée en 2000 par la même société, dans le cadre d’une demande en déchéance. L’examen des demandes formées par le tiers impliquait notamment pour le tribunal d’analyser si l’usage fait de ce signe l’était bien « à titre de marque ».

Dans cette logique, le tribunal relève que « la marque contestée a été promue par de nombreuses campagnes publicitaires, figurait sur les emballages des produits, et était directement visible lors de l’achat à travers l’emballage transparent ». Dans la mesure où d’importantes campagnes publicitaires et la représentation systématique sur les emballages ont permis au consommateur d’être confronté « d’une manière intense » à cette marque, le tribunal en a déduit que le consommateur pouvait établir « facilement un lien avec le producteur à partir du visage souriant ». Autrement dit, cette représentation de chips constitue une marque valable.

Il y a toutefois lieu de rappeler que cette démonstration vaut pour la marque européenne déposée en 2000 et il n’est pas certain qu’une nouvelle demande de marque déposée en 2023 serait également jugée valable.
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