Newsletter DDS - Février 2024
Direction technique droit social

Un salarié peut toujours contester les conditions de validité d’un accord collectif

A l’occasion d’un litige prud’homal, un salarié peut invoquer le non-respect des conditions légales de validité d’un accord collectif par la voie de l’exception d’illégalité. Cette contestation n’est donc pas soumise au délai de 2 mois applicable à la voie de l’action en nullité.
 
Cette solution inédite a été récemment rendue par la chambre sociale (Cass.soc., 31 janvier 2024, n° 22-11.770) et pourrait entraîner des contentieux nouveaux.
 
Dans cette affaire, un salarié, en 2016, soulève l’illégalité d’un accord d’entreprise conclu en juillet 2010 relatif à l’aménagement du temps du travail sur la base duquel son contrat de travail avait été conclu.
 
Il invoquait comme motif d’illégalité l’absence de capacité de signature des délégués syndicaux ayant conclu l’accord à l’époque.
 
L’employeur soutenait qu’un salarié ne peut, en exception d’illégalité, soulever que des motifs tenant au fond de l’acte c’est-à-dire liés au contenu d’une ou plusieurs clauses et non des motifs liés aux conditions de conclusion de l’accord.
 
La Cour de cassation retient qu’un salarié, par la voie de l’exception d’illégalité, peut invoquer un non-respect des conditions légales de validité d’un accord collectif relatives notamment à la qualité des parties signataires.
 
Concrètement, l’exception d’illégalité permet à un salarié lors d’un litige individuel de faire reconnaître l’illégalité d’un accord collectif afin que ce dernier lui soit déclaré inopposable sans que la nullité de l’acte ne vaille vis-à-vis des autres salariés.
 
Le Conseil constitutionnel avait déjà eu l’occasion de retenir que l’exception d’illégalité n’était enserrée dans aucune condition de délai (Cons.const., 21 mars 2018, n° 2018-761 DC).
 
Rappelons qu’au contraire l’action en nullité d’un accord collectif, appelée voie d’action, peut être engagée dans un délai de 2 mois à compter de la notification de l’accord d’entreprise aux organisations syndicales disposant d’une section syndicale dans l’entreprise ou de la publication de l’accord dans la base de données nationales dans les autres cas (C.trav., art. L. 2262-14).
 
Toute la question de l’arrêt portait sur le champ de l’exception d’illégalité. Ce dernier est donc entendu largement puisqu’un salarié peut faire déclarer inopposable un accord en raison, non pas de son contenu, mais de ses conditions de validité.
 
Cet arrêt peut entraîner des conséquences importantes surtout lorsque l’on sait comment ont été conclus les premiers accords d’aménagement du temps de travail ou de passage au 35 heures qui sont, parfois, toujours en vigueur dans les entreprises.
 
Il pourrait être temps, pour certaines entreprises, de reprendre ces accords afin de vérifier leurs conditions de conclusion.
 
Seule restriction à ce champ de l’exception d’illégalité : il ne peut être invoqué un grief tiré des conditions dans lesquelles a eu lieu la négociation de l’accord. Sous ce vocable sont visées les contestations liées à la loyauté des négociations.
 
Lire l’arrêt n° 22-11.770 rendu le 31 janvier 2024 par la Cour de cassation
Conformément à la loi Informatique et libertés du 6 janvier 1978 modifiée en 2004, vous disposez d'un droit d'accès, de rectification et de
suppression des données vous concernant, que vous pouvez exercer en vous adressant à dpo@fidal.com.