Lettre d'information : Propriété Intellectuelle / Numérique, Tech et Données n° 156 (novembre-décembre 2022)
Direction Technique Droit Economique

Documents numériques et signature électronique : gare à la certification du procédé de signature

CJUE., 20 octobre 2022, aff. n° C-362/21, « Ekofrukt » EOOD c/ Direktor na Direktsia « Obzhalvane i danachno-osiguritelna praktika »

À l’occasion d’un contrôle fiscal exercé par l’administration bulgare contre une société de vente en gros et au détail de fruits et légumes, un redressement a été adressé à cette dernière au titre d’arriérés de TVA.

Cette société contestait la procédure de redressement, notamment au prétexte que les documents émis par l’administration fiscale, à l’occasion des opérations de contrôle, puis de la notification du redressement, n’étaient pas valides dans la mesure où ils n’avaient pas été authentifiés au moyen d’une « signature électronique qualifiée », telle que l’exige le Règlement n° 910/2014 du 23 juillet 2014 (c’est-à-dire la catégorie de signature électronique présumée être assimilable à une signature manuscrite).

Or, dans cette affaire, l’administration fiscale avait pourtant fait appel à un « service de confiance » qui certifiait avoir émis des « signatures électroniques professionnelles ».

Pour trancher la question de la validité des documents en cause, le juge bulgare a saisi la Cour de justice de l’UE d’une question préjudicielle visant à déterminer si une telle « signature électronique professionnelle » pouvait être assimilée à une « signature électronique qualifiée ».

Dans sa décision du 20 octobre 2022, la CJUE énonce d’abord que le Règlement n° 910/2014 n’impose pas le principe d’une signature électronique « qualifiée » pour considérer qu’un document sous forme numérique est authentique. Au contraire, le texte autorise les États membres à définir dans quels cas une telle signature apparaît nécessaire et retient que l’effet juridique d’une signature électronique ne peut être écarté par un juge au seul motif que cette signature n’est pas « qualifiée ».

Mais la Cour apporte également une précision importante pour résoudre le litige en pratique. En effet, elle affirme que seule compte la nomenclature des différentes signatures électroniques prévues par le Règlement n° 910/2014. Ainsi, des qualifications commerciales comme celles de « signature électronique professionnelle » absentes du texte ne peuvent être assimilées à celles du Règlement que si elles en respectent les conditions. Or, en l’occurrence, cette signature électronique n’a pas été délivrée au moyen d’un « certificat qualifié de signature électronique » délivré par un « prestataire de services de confiance qualifié ». Dès lors, ce seul défaut suffit à écarter le bénéfice du caractère « qualifié » à cette signature électronique utilisée par l’administration fiscale.

Autrement dit, le juge bulgare saisi de ce litige devra décider d’annuler ou de valider ces documents administratifs selon les éventuelles conditions formelles du droit bulgare, sans pouvoir décider que les documents notifiant le redressement fiscal sont nuls au seul motif que la signature électronique n’est pas « qualifiée ».

En conclusion, les opérateurs qui recourent à la signature électronique doivent veiller à faire appel à un prestataire répondant effectivement aux critères et définitions officiels du Règlement pour bénéficier des effets accordés à telle ou telle signature.
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