Lettre d'information : Propriété Intellectuelle / Numérique, Tech et Données n° 155 (septembre-octobre 2022)
Direction Technique Droit Economique

QUELLE EST LA NATURE DE LA FAUTE COMMISE AU TITRE DE LA VIOLATION D’UN CONTRAT DE LICENCE ? LA COUR DE CASSATION TRANCHE ENFIN LES ERREMENTS DES JUGES DU FOND

Cass. 1ère Civ., 5 octobre 2022, n° 21-15.386

Serait-ce l’épilogue de la controverse amorcée par les juges parisiens en 2019 alors que deux parties à un contrat de licence sur un logiciel se querellaient à propos du fondement de responsabilité – délictuelle ou contractuelle – devant être invoqué au titre de la violation des termes de ce contrat ?

Pour rappel, dans sa décision rendue le 19 mars 2021, la cour d’appel de Paris avait considéré que dans une telle situation, le titulaire de droits de propriété intellectuelle exploités dans le cadre d’une licence devait recourir au fondement contractuel, excluant, ce faisant la possibilité de bénéficier des dispositions du Code de la propriété intellectuelle (sur le fondement délictuel), en vertu du principe de non-cumul des régimes de responsabilité : « lorsque le fait générateur d'une atteinte à un droit de propriété intellectuelle résulte d'un manquement contractuel, le titulaire du droit ayant consenti par contrat à son utilisation sous certaines réserves, alors seule une action en responsabilité contractuelle est recevable par application du principe de non-cumul des responsabilités ».

Cet arrêt est censuré par la haute juridiction dans sa décision du 5 octobre 2022, qui, au terme d’une motivation particulièrement riche, apporte une réponse aux développements proposés par le juge d’appel. En effet, la difficulté découlait de la manière dont il convenait d’articuler la position de la CJUE, avec celle du principe de non-cumul des régimes de responsabilité en droit français.

Pour la CJUE, tout acte d’atteinte aux DPI au sens de la Directive n° 2004/48 doit permettre à son titulaire de pouvoir bénéficier des garanties prévues par cette dernière directive, indépendamment du régime de responsabilité applicable selon le droit national (CJUE., 18 décembre 2019, aff. n° C-666/18, IT Development SAS c. Free Mobile SAS).

La cour d’appel de Paris, bien qu’ayant analysé les termes de la décision de la CJUE, avait déclaré l’action du titulaire irrecevable, puisque celui-ci, arguant une atteinte au contrat de licence, avait néanmoins agi sur le fondement délictuel de la contrefaçon.

Finalement, la Cour de cassation décide que le titulaire des DPI était légitime à actionner le tiers sur le terrain de la contrefaçon dès lors que la responsabilité contractuelle ne lui permettait pas de bénéficier des dispositions protectrices du CPI. Par conséquent, les parties sont renvoyées devant une cour d’appel qui devra statuer sur ces demandes.
 
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